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Gaza : une enquête révèle les changements drastiques des règles d'ouverture du feu par Tsahal après le 7 octobre
Le seuil de dommages collatéraux acceptables a été relevé, fixé à 20 civils potentiels par frappe
Une enquête majeure du New York Times publiée ce jeudi met en lumière les transformations profondes des opérations militaires israéliennes à Gaza après l'attaque du 7 octobre. Le journal américain dévoile comment, face à une situation jugée existentielle, l'armée israélienne a fondamentalement modifié ses règles d'engagement, conduisant à l'une des campagnes aériennes les plus intenses de l'histoire militaire moderne.
Le 7 octobre 2023, à 13 heures précises, une décision historique est prise : pour la première fois depuis le début des conflits avec le Hamas, le haut commandement de Tsahal autorise les officiers de rang intermédiaire à ordonner des frappes sans validation hiérarchique supérieure. Cette décentralisation sans précédent s'accompagne d'un relèvement significatif du seuil de dommages collatéraux acceptables, désormais fixé à 20 civils potentiels par frappe.
Un officier supérieur, s'exprimant sous couvert d'anonymat, explique au Times que cette décision répondait à "une menace existentielle" après le massacre ayant coûté la vie à environ 1 200 Israéliens et conduit à l'enlèvement de 250 autres. La crainte d'une possible intervention du Hezbollah depuis le Liban a également pesé dans cette décision.
L'enquête, basée sur l'analyse de dizaines de documents militaires et plus de 100 témoignages, dont 25 officiers directement impliqués dans l'autorisation des frappes, révèle l'ampleur du changement. Avant le 7 octobre, les frappes n'étaient généralement autorisées qu'en l'absence quasi-totale de risque pour les civils, avec un maximum exceptionnel de 5 à 10 victimes potentielles.
Le 8 octobre, un nouvel ordre fixe une limite quotidienne de 500 victimes civiles potentielles pour l'ensemble des opérations. Cette restriction est levée deux jours plus tard, laissant aux officiers la latitude d'autoriser des frappes qu'ils jugeaient conformes au droit.
Le Times rappelle que selon les autorités sanitaires de Gaza, les sept premières semaines de guerre ont fait environ 15 000 victimes, et souligne que l'intensité des bombardements - près de 30 000 bombes larguées - surpasse celle de toutes les opérations précédentes. Face aux critiques internationales, Tsahal a revu ses pratiques à partir de novembre 2023, divisant par deux le nombre de victimes civiles acceptables pour les cibles de moindre importance.
Dans une réponse détaillée au New York Times, l'armée israélienne souligne le caractère exceptionnel du conflit et la difficulté d'appliquer les précautions habituelles dans ce contexte. Elle met en avant plusieurs facteurs, notamment l'ampleur sans précédent de l'attaque du 7 octobre, l'utilisation systématique de boucliers humains par le Hamas et la complexité du réseau souterrain de tunnels.
Cette enquête intervient alors qu'Israël fait face à des accusations de génocide devant la Cour internationale de Justice, accusations qu'il rejette fermement en soulignant ses efforts pour minimiser les pertes civiles.
L'enquête du Times suggère enfin qu'après le traumatisme du 7 octobre, certains officiers ont adopté une approche moins stricte des protocoles militaires. Cinq officiers supérieurs ont utilisé l'expression "épée pour épée" - par analogie avec "dent pour dent" -, pour décrire l'état d'esprit qui régnait alors dans l'armée, illustrant la tension entre nécessité militaire et protection des civils dans ce conflit.