"Ma mère, Dieu et Sylvie Vartan" : L'histoire extraordinaire de Roland Pérez
Déjà dans le "top 3 des meilleurs films les plus vus depuis sa sortie" mercredi dernier, ce long-métrage met en scène le combat extraordinaire d'une mère pour que son fils puisse marcher un jour.


Invité du Grand Oral, Roland Pérez est venu présenter son film "Ma mère, Dieu et Sylvie Vartan", adaptation de son livre autobiographique, qui raconte l'histoire incroyable de son enfance. Déjà dans le "top 3 des meilleurs films les plus vus depuis sa sortie" mercredi dernier, ce long-métrage réalisé par Ken Scott met en scène le combat extraordinaire d'une mère pour que son fils puisse marcher un jour.
Un enfant condamné à ne jamais marcher
"Nous allons parler de l'histoire d'une maman, plus précisément une mère juive qui aura tout fait, absolument tout fait, pour sauver son fils du handicap," annonce l'animateur en présentant son invité. Né avec un "pied bot", Roland Pérez se déplaçait "à quatre pattes dans cette HLM du 13ème arrondissement jusqu'à l'âge de sept ans."
Tous les médecins consultés étaient formels : "Votre enfant est handicapé", lui disaient-ils. Sa mère, Esther, n'a jamais accepté ce verdict. "Ma mère s'attendait pour moi à rien de moins qu'un miracle", confie Roland Pérez, dont l'histoire est incarnée à l'écran par Jonathan Cohen et Leïla Bekhti dans le rôle de sa mère.
Le traitement miraculeux et Sylvie Vartan
L'espoir survient lorsqu'un oncle au Maroc leur conseille de consulter un rebouteux. Malheureusement, à leur arrivée, ils découvrent que "ce n'est pas un médecin. C'est un rebouteux et que le rebouteux est mort." C'est alors que sa veuve intervient et propose d'essayer de reproduire les méthodes de son défunt mari. "Va commencer un traitement très lourd, très difficile qui va durer 18 mois," raconte Roland Pérez. Immobilisé avec un corset et des attelles, jour et nuit, il doit maintenir "deux positions à tenir" pour permettre l'extension totale de sa jambe et que "le talon puisse sortir enfin." Pour qu'un enfant accepte une telle immobilité, il fallait une distraction puissante. C'est là qu'entre en jeu Sylvie Vartan, star yéyé des années 70. La rebouteuse demande à sa mère : "Qu'est-ce qu'il aime, Roland ?" La réponse va conduire à une prescription pour le moins originale. "On va dire à ma mère, écoutez, Sylvie Vartan, ce n'est pas Mozart, madame, mais Sylvie Vartan fait partie du traitement." "Vous allez donc lui acheter tout ce qui concerne Sylvie Vartan. Vous allez lui acheter un petit mange-disque, des disques. Il va falloir qu'il soit occupé pour qu'il n'ait pas envie de sortir, de se détacher, d'essayer de marcher," rapporte Roland Pérez.
Une enfance sauvée par la musique
Cette fascination pour la chanteuse blonde s'explique facilement : "J'étais entouré que de bruns. Ma mère était très brune. Ma sœur était très brune. Les voisines étaient très brunes. Tout le monde était très brun. Et d'un seul coup, cette blondeur qui rentre comme ça, ses dents écartées, ses tenues brillantes." Cette période d'immobilité forcée aurait pu être un cauchemar, mais elle devient paradoxalement une expérience formatrice. Menacé d'être placé en famille d'accueil par les services sociaux, incarnés dans le film par Jeanne Balibar, Roland doit apprendre à lire. "Mon frère Jacques m'a appris à lire et à écrire... Les chansons de Sylvie sont toutes trouvées pour m'apprendre à lire."
Le vivre-ensemble d'une époque révolue
Au-delà de l'histoire personnelle, Roland Pérez souligne la dimension sociale de son film : "Je voulais dire merci à ma maman. Merci à toutes les mamans qui étaient dans cet HLM bigaré du 13e arrondissement et qui étaient musulmanes, chinoises, italiennes, corses, et toutes ces femmes qui vivaient ensemble." Il évoque avec nostalgie "un vivre-ensemble qui me manque terriblement dans cette France terrible qu'on vit aujourd'hui." Dans le film, on voit comment toutes ces voisines "se sont mobilisées pour aider le petit garçon" qu'il était. "On fêtait les fêtes des uns, les fêtes des autres. On allait à la fin du Ramadan leur apporter des gâteaux. Eux, ils venaient à la fin de Kippour ou d'autres fêtes nous apporter des gâteaux aussi à leur tour." Roland Pérez défend avec passion le choix de Leïla Bekhti pour incarner sa mère juive : "Je ne vois pas pourquoi une actrice musulmane ne pourrait pas jouer une mère juive. Je le dis et je le répète, je ne comprends pas pourquoi et pourquoi une actrice juive ne pourrait pas jouer une mère musulmane."
Il souligne que l'actrice "est exceptionnelle parce que je peux vous dire que cet octobre, elle l'a vécu. On était en plein tournage. On était main dans la main. Elle était par terre, comme nous tous. On était effarés. Effarés de cette violence." Il ajoute : "Son cœur de mère parle pour tous les enfants, que ce soit des enfants juifs, des enfants musulmans."
Un titre qui reflète les priorités
Le titre "Ma mère, Dieu et Sylvie Vartan" place chaque élément dans l'ordre de son importance. "Tout a commencé par la mère. Ma mère a toujours pensé qu'elle était l'adjointe de Dieu. Donc, j'ai mis ma mère en premier, parce que c'est elle qui a averti Dieu sur mon cas," explique Roland Pérez avec tendresse. Il évoque cette phrase d'Albert Einstein qui résume sa philosophie : "Le hasard, c'est Dieu qui se promène incognito." Il explique : "Le hasard, il faut aussi le voir. Ce n'est pas simplement que le hasard se promène comme ça. Il se promène incognito, mais il faut avoir envie de le voir."
L'incroyable épilogue avec Sylvie Vartan
L'histoire prend une dimension presque magique lorsque Roland Pérez, devenu avocat après avoir guéri, se retrouve à défendre... Sylvie Vartan elle-même. "Le plus grand des hasards fait que Sylvie Vartan, parce que je m'occupais d'artistes, mais moi, je n'ai jamais cherché à approcher Sylvie Vartan." Pourquoi n'a-t-il jamais révélé son histoire à la chanteuse ? "Parce que je ne voulais surtout pas, d'abord, lui raconter cette histoire qui était totalement folle. Je ne voulais pas qu'elle puisse penser que je suis un fan qui essayait d'intriguer, d'arriver vers elle." Il ajoute avec humour : "C'était liaison fatale pour moi. Je me suis dit, elle va penser que je vais mettre son chien dans l'eau chaude."
Ce n'est que bien plus tard, après le décès de sa mère, que Sylvie Vartan apprendra le rôle crucial qu'elle a joué dans sa vie. "Aujourd'hui, Sylvie est devenue une de mes plus proches amies," conclut-il avec émotion.
"Ma mère, Dieu et Sylvie Vartan", un film réalisé par Ken Scott avec Leïla Bekhti et Jonathan Cohen, est actuellement dans toutes les salles de cinéma.