Journée de commémoration de la Shoah : le témoignage d'un survivant d'Auschwitz qui n'a pu comparaître lors du procès Eichmann révélé
Yehiel De-Nur (Ka-Tsetnik) s'était effondré à la barre et n'avait pu témoigner
À l'occasion de la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de la Shoah, les Archives nationales d'Israël ont publié lundi matin de nombreux documents de la préparation du procès Eichmann en 1961, dont le témoignage complet du survivant de la Shoah Yehiel De-Nur (nom de plume Ka-Tzetnik) qui n'avait pas été donné à la barre. "Ce regard, je ne pourrai jamais l'oublier, il me semblait que l'homme me regardait à travers les trous des yeux de la tête de mort sur sa casquette", avait-il raconté à propos de sa rencontre avec Eichmann. De-Nur s'était effondré à la barre avant de pouvoir témoigner.
De-Nur avait donné son témoignage à un officier de police avant le procès, dans lequel il racontait son séjour au camp de concentration d'Auschwitz. Sur son arrivée au camp, il témoigne : "L'officier de la Gestapo Dreier qui supervisait la liquidation, apparaissait principalement lors du chargement des convois de personnes depuis le lieu de rassemblement vers la gare... Nous avons été poussés dans le wagon sous les coups et les tirs dans la foule, nous étions tellement serrés que nous ne pouvions même pas respirer à l'intérieur, il y avait des gens sous nos pieds et au-dessus de nos têtes. Je savais que nous étions conduits à Auschwitz... nous savions que nous étions conduits à la mort, mais nous ne savions pas quelle forme avait cette mort appelée Auschwitz. La distance jusqu'à Auschwitz n'était pas grande, environ 40 kilomètres au total, et quand nous sommes arrivés à la gare d'Auschwitz, la moitié du wagon était sans vie. Si nous avions continué encore une demi-heure dans ces conditions, personne n'aurait survécu..."
Il a également décrit qu'il savait qu'une extermination massive était menée dans les chambres à gaz, mais qu'il essayait de repousser cette pensée. "Nous sommes passés devant un groupe de SS qui faisaient la sélection et l'un d'eux indiquait à chacun où aller. Ceux qui étaient dirigés vers la droite étaient chargés dans des camions et, comme je l'ai appris plus tard, conduits directement à la mort, et ceux qui étaient dirigés vers la gauche, dont moi, ont été alignés et à la fin de la sélection, nous avons été conduits à la tombée de la nuit vers Birkenau. De loin, j'ai vu une haute cheminée d'où sortait une fumée épaisse avec des étincelles de feu. Une rumeur circulait déjà dans le ghetto selon laquelle à Auschwitz, on mourait par le gaz et on brûlait, et bien que nous ne pouvions pas y croire, cette information existait. Quand j'ai vu la cheminée de loin et que j'ai vu que nous marchions dans cette direction, il était clair pour moi que c'était notre dernière marche et que nous marchions vers la mort. Cependant, l'étincelle de vie qui était en chacun de nous ne nous permettait pas d'accepter complètement cette pensée."
Sur sa rencontre terrifiante avec Eichmann, il a témoigné : "Je me tenais à la porte face au bâtiment de la 'Zentrale' et voilà que sortit de là cet officier SS qui, lorsque j'étais chez Dreier, avait déchiré mes papiers. Lorsque j'étais chez Dreier, ce qui s'est surtout gravé dans ma mémoire était son regard - c'était un regard perçant, hypnotique et terrifiant. J'ai regardé son visage et je n'ai vu que les yeux. Ce regard, je ne pourrai jamais l'oublier, il me semblait que l'homme me regardait à travers les trous des yeux de la tête de mort sur sa casquette."
La collection, déjà révélée par les Archives nationales, est proposée à nouveau au public d'une manière qui permettra une recherche indépendante. La collection - les documents du "Bureau 06" rassemblés par la police israélienne lors de la préparation du procès d'Adolf Eichmann en Israël en 1961 - comprend également les dossiers du tribunal, la correspondance du parquet et du Premier ministre David Ben Gourion. La collection contient 380 000 pages de témoignages bouleversants, de correspondances, de listes et de photos.